Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/90

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Qui rassemble tout l’homme en des coups d’énergie,
Flottent dans l’indolente et vague nostalgie
D’un bonheur dont la terre est le riant décor ;
S’ils deviennent, surtout, incapables d’accord,
Si chacun à son gré veut trouver des idoles
Dans les mystérieux et permanents symboles
Où s’incarne la loi de danger et d’effort
Qui fait de toute vie un recid de la mort ;
Si chacun, se prenant pour arbitre suprême,
Fait passer l’univers par le chais de soi-même,
Et s’imaginant tordre en ses débiles doigts
L’effrayant écheveau des forces et des lois,
N’en retire qu’un lin d’humaine petitesse ;
Si tels que ces marins exaltés par l’ivresse
Qui, pour s’enorgueillir du fil de leur couteau,
Coupent éperdument les liens du radeau,
Tous veulent démontrer que toute chose est vide,
— Sans voir que notre peu de puissance réside
Au pouvoir d’assembler toutes ces vanités
En systèmes un peu moins vains de volontés,
Dont nous n’ignorons pas l’éphémère structure,
Ni qu’elle est une gerbe où chaque épi s’assure
D’un lien fait de paille et qu’une main détend,
Mais qui les garde au moins d’être épars par le vent ; —