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annales de la société j. j. rousseau

devine seulement la position qu’elles devaient occuper pour attribuer à Rousseau des mains d’aristocrate, Audigier a, sans s’en douter, tiré argument de la fantaisie d’un lithographe du xixe siècle. — L’expression de la physionomie, assez indistincte car la tête est un peu penchée et les yeux sont dans l’ombre, n’est pas non plus tout à fait la même sur la lithographie, qui l’étrécit légèrement et l’amenuise, et sur le dessin, où le front paraît plus large : le lithographe a fait ressortir les prunelles en les détachant sur la blancheur de la cornée, d’où résulte une impression de finesse un peu rusée ; sur le dessin, où les prunelles ne sont pas complètement entourées de blanc, l’expression est plus bonhomme et plus endormie. Une tradition, recueillie dans l’entourage de Houël[1], veut d’ailleurs que l’artiste, tout au moins pour commencer son dessin, ait profité d’un moment où Rousseau sommeillait au coin du feu, après son diner. Les indications du dessinateur quant à la physionomie sont, en tout cas, assez sommaires, et l’on s’étonne que Buffenoir et M. Vloberg y découvrent toute la profondeur d’un admirable « portrait intime », « portrait plus pénétrant que les plus fines analyses de (l’)âme et (des) œuvres », et y lisent sans hésitation, le premier toutes les vertus, le second la sinistre noirceur qu’il prête au philosophe[2] ; ce ne sont là qu’interprétations arbitraires et passionnées, et l’œuvre que nous étudions, où la figure proprement dite occupe si peu de place[3], ne saurait

  1. Notice sur Houël, par Lecarpentier, Rouen, 1813. (Cité par Buffenoir.)
  2. M. Vloberg, op. cit., p. 143.
  3. Dans le dessin, qui tout entier mesure 20 centim. sur 15, la figure proprement dite occupe environ 2 cent. sur 1 1/2.