Page:Apoukhtine - La Vie ambiguë.djvu/139

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milieu de duplicité et de mensonge. Ces pensées me passaient par la tête autrefois déjà, mais le bruit continuel de la vie mondaine étouffait la voix de la conscience, tandis qu’aujourd’hui je vois cela clairement. Ne pense pas que j’accuse le monde pour me justifier ; même avant que ma vie se fût remplie de brouillard, je ne trouvais pas que je fisse bien. Le jour de la Sainte Catherine, après ton grand dîner, je suis allée chez une autre personne dont c’était aussi la fête : chez la baronne Vizen. Aussitôt entrée, la société m’a étonnée : c’était sans doute un pur hasard, mais nous étions sept ou huit femmes ayant chacune une liaison mondaine, et chacune savait que ce détail était connu des autres ; les hommes présents étaient également au fait, sans doute, sauf peut-être un diplomate étranger quelconque, et encore je ne répondrais pas de son ignorance, car les diplomates qui fréquentent chez la baronne connaissent tout. Il semble qu’il n’y eût pas là de quoi être bien fière, et cependant avec quelle fierté nous nous sommes saluées, et comme le ton de l’entretien était élevé ! Avec quelle sévérité avons-nous jugé les personnes de notre monde, et avec quel mépris avons-nous parlé du reste de l’humanité ! Entre autres, on s’est