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CONTES DE PARIS ET DE PROVENCE

Je pris la tête ; et nous remontâmes un peu pâles, un peu émus, fiers, certes ! de notre aventure, mais heureux tout de même de revoir la douce clarté du jour.

— Ce fut un événement dans la cour. J’arrivai, cachant le crâne sous ma blouse, et du coup, mon ami et moi, nous passâmes à l’état de héros. Clavajoux en jaunissait. Vingt fois il fallut recommencer en détail le récit de la découverte, vingt fois décrire la sépulture… Mais était-ce bien une sépulture ? Ne serait-ce pas plutôt quelque cachot, quelque sombre in pace ?

Alas poor Yorick ! que de méditations à propos de ce crâne ! Les uns voyaient en lui les restes d’un bon religieux des temps passés, à barbe blanche, pieds nus dans des sandales traînantes ; les autres tenaient pour une victime de l’Inquisition.

Quant à moi, j’essayai de résumer poétiquement ces impressions diverses dans une ballade romantique qui commençait par cette apostrophe :

« Crâne d’un ancien mort, ô vénérable crâne,
Réponds-moi… »

Le crâne ne répondait rien et souriait toujours de son énigmatique sourire.

Cela dura jusqu’aux vacances de Pâques. À la rentrée, l’attendrissement était moindre et l’enthousiasme sensiblement refroidi. L’introduction d’un renardeau vivant par ce diable de Clavajoux porta le dernier coup à la popularité du crâne.

Moi-même, l’avouerai-je ? je commençais à trouver