Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/198

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Églantine ne la contredisait pas, au contraire. Elle ajoutait à l’éloge de Clément la tendresse reconnaissante qu’il avait vouée au patron et elle prédisait une bien autre tendresse pour la femme et les enfants qui partageraient sa vie. Mme Dalignac n’oubliait pas non plus que c’était à lui qu’elle devait le bonheur de son ménage. Et comme si la connaissance de son passé eût été un lien qui devait m’unir plus fortement à son neveu, elle conta un soir comment s’était fait son mariage.

Lorsqu’elle avait dû remplacer sa sœur auprès des trois orphelins, les deux fillettes ne lui avaient donné que peu de peine, mais il n’en avait pas été de même de leur frère. Ce gamin de dix ans s’était montré dur, insolent et volontaire. Il ne répondait aux caresses que par des moqueries, et aux reproches que par des accès de fureur qui épouvantaient sa tante et ses sœurs.

Cependant, cet enfant si difficile à manier travaillait bien à l’école, et passait pour un élève docile et respectueux. Sa docilité et son respect n’étaient pas moindre envers Dalignac, le brodeur qui venait presque chaque jour prendre ou rapporter du travail à l’atelier. Et ainsi la jeune mère adoptive avait compris que pour élever un garçon, l’autorité d’un homme était nécessaire.

D’autre part, le brodeur qu’on avait toujours connu effacé et timide avait pris de l’audace en devenant le grand camarade de l’enfant. Il rejoignait la petite famille dans ses promenades du