Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/149

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grand plaisir était de chercher des vers et des chenilles dans une pile de bois qui se trouvait là, et dont elle sondait chaque trou avec autant de soin et de dextérité que le pic à bec d’ivoire. Parfois aussi, avec la patience d’un chat, elle guettait les mouvements de quelques souris qui avaient établi leur domicile aux environs. Du premier coup elle les tuait, les avalait d’un seul morceau ; et tant et si bien elle en prit, qu’elle les extermina toutes, l’une après l’autre. Je la nourrissais, en outre, de blé, des restes de la cuisine auxquels j’ajoutais du pain, du fromage et même des pommes. On lui avait donné de la paille, pour l’empêcher de se salir les pieds ; elle la prenait dans son bec et l’arrangeait autour d’elle en rond, comme pour faire un nid. Parfois, elle restait des heures entières sur une seule jambe, dans une posture très gracieuse ; mais ce qui me paraissait surtout curieux, c’est qu’il y avait une jambe dont elle se servait de préférence, ou plutôt exclusivement, car personne de la maison ne put jamais la voir se tenir ainsi sur l’autre. Cette habitude se rattachait probablement à la mutilation de son aile, la jambe dont elle faisait usage correspondant au côté blessé. Le moignon de l’aile semblait l’incommoder beaucoup, et particulièrement à l’approche de l’hiver. Elle hérissait et ramenait ses plumes tout autour et l’abritait avec tant de soin, que véritablement j’en souffrais pour la pauvre bête. Quand le froid devenait trop vif, elle se retirait régulièrement, au soir, sous un passage couvert où elle restait pendant les heures de la nuit ; mais elle n’y entrait jamais qu’avec une répugnance marquée, et