Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/174

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obliquement le fil de l’eau, la tête bien élevée au-dessus de sa surface, les naseaux dilatés, et sans faire entendre rien qui rappelât ce bruit de reniflement habituel à beaucoup de chevaux, dans de semblables occasions. Je le menai et le ramenai, tantôt en aval du courant, tantôt directement à l’opposé ; enfin, le trouvant tout à fait à mon gré, je regagnai le bord où il s’arrêta de lui-même, et se détira les membres en se secouant, de façon à me faire presque perdre la selle. Après quoi, je le mis au galop, et tout en courant pour revenir à la maison, je tuai un gros dindon sauvage dont il s’approcha, comme s’il eût été dressé pour cette chasse, et qu’il me permit de ramasser sans descendre.

À peine rentré chez le docteur Rankin, où je demeurais, j’envoyai un mot au propriétaire du cheval, pour lui dire que je serais bien aise de le voir. Quand il fut venu, je lui demandai son prix. — Cinquante dollars au plus bas. — Je comptai la somme, pris un reçu et devins ainsi maître de l’animal. Le docteur, juge des plus compétents en cette matière, me dit en souriant : Monsieur Audubon, quand vous en serez fatigué, je me charge de vous rembourser votre argent : car, comptez-y, c’est un cheval de première qualité. Lui-même il le fit ferrer ; et pendant plusieurs semaines ma femme s’en servit, et s’en trouva parfaitement bien.

Des affaires m’appelant à Philadelphie, Barro (il avait été ainsi nommé, d’après son premier propriétaire), fut mis au repos et convenablement préparé dix jours à l’avance. Le moment de mon départ étant arrivé, je