Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 2.djvu/88

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avec une écrevisse, et l’attachai, comme je l’ai dit, aux branches d’un arbre. Le lendemain matin, quand j’allai pour la tirer, il me sembla qu’elle tenait à fond : cependant, en m’y prenant en douceur, je la sentis venir ; mais une forte secousse me fit glisser la corde entre les doigts, et au même instant un gros Chat marin bondit hors de l’eau. Je le laissai se débattre un moment, et lorsqu’il se fut épuisé, je le pris. Il avait avalé l’hameçon tout entier, et je fus obligé de couper la ligne à ras de sa gueule. Alors, lui passant un bâton dans l’une des ouïes, nous l’emportâmes, mon domestique et moi, à la maison. En l’ouvrant, jugez de notre surprise ! Il avait dans l’estomac une belle perche blanche qui était morte, mais nullement détériorée. Cette pauvre perche s’était légèrement prise à l’hameçon, et le Chat marin l’ayant engloutie se l’était lui-même enfoncé dans l’estomac. Bien que l’instrument fût petit, je ne doute pas que la douleur qu’il lui causait ne l’eût, à la longue, fait périr. Nous mangeâmes la perche, et le chat fut partagé en quatre portions, que nous distribuâmes parmi nos voisins. Nicolas Berthoud, un de mes bons amis et le meilleur pêcheur que j’aie jamais connu, tendit un jour une ligne dormante dans le bassin qui est au-dessous des moulins de Tarascon, au lieu où tombent les rapides de l’Ohio. Je ne me rappelle pas bien quel était le genre d’appât ; mais toujours est-il qu’en levant notre ligne nous trouvâmes un très beau Chat marin, dans le corps duquel était au moins la moitié d’un cochon de lait.