Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/132

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les ruines. Voilà encore le sentier par lequel on portait des vivres dans la caverne. Ici sont les remparts à l’aide desquels on espérait arrêter l’ennemi. Mais les chevaux des Tatars seraient montés sur les murs, s’il avait fallu : aussi venaient-ils jusque auprès de la caverne, et les cavaliers frappaient les rochers à coups de sabre en poussant de grands cris. Vous pensez si alors on sortait.

» Un jour les femmes et les enfants s’étaient enfermés avec quelques hommes, tandis que les autres se battaient à l’armée. Les Tatars vinrent hurler, suivant leur habitude, au pied de la caverne dont ils connaissaient bien le chemin. Comme le pays était ravagé d’un bout à l’autre, ils ne mangeaient, eux et leurs chevaux, que l’écorce des arbres. Les assiégés avaient d’abord des vivres ; mais ils les usèrent et souffrirent de la faim. Quant aux Tatars, quoiqu’ils souffrissent plus encore, ils s’encourageaient en pensant à tout ce monde qui allait tomber entre leurs mains d’un jour à l’autre. Or il arriva qu’une femme fit un gros gâteau en pétrissant de la cendre avec un peu de farine qui lui restait. Puis l’attachant au bout d’une perche, de façon qu’on pût le voir du dehors, elle cria : « Kutya fejü, Talárok ; Tatars à têtes de chiens, mangez, mangez l’herbe et l’écorce des arbres, tandis que nous faisons ici bonne chère. » Les Tatars à têtes de chiens ne se doutèrent pas de la ruse, et ils allèrent se faire assommer plus loin. Vous riez ? mais il est sûr que les Tatars n’avaient pas