Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/139

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vre toute seule, avec grand bruit, reste ouverte jusqu’à deux heures du matin et se referme violemment. Qui sait ce qui arriverait à celui qui franchirait la porte ?....

Mais une fée habite la caverne. On l’entend gronder quand le vent souffle dans la vallée. Lorsque le choléra tuait tant de monde dans le pays, les femmes d’Almás disaient que la fée était en colère contre les hommes, et leur soufflait la maladie. Elles pensèrent qu’elle avait froid, parce qu’elle était sans vêtements. Alors on fit à la hâte deux chemises qui furent placées sur les deux routes que devait prendre la fée au sortir de la caverne, si bien que, d’une manière ou d’une autre, elle pouvait s’habiller et s’adoucir. Une nuit, à Karácsonfalva, une voix lugubre cria : « Je veux des habits ! » Aussitôt douze femmes travaillèrent sans relâche, en silence, et les chemises faites furent déposées à l’entrée du village… Il était évident que notre brave Sicule n’ajoutait pas grand’ foi à toutes ces histoires, produits de l’imagination des vieilles femmes de son pays, qui nous furent aussi confirmées par d’autres. Cependant je n’assurerais pas qu’il eût parcouru sans crainte la mystérieuse caverne, s’il se fût trouvé seul : se voyant avec des gens qui paraissaient savoir mieux que lui ce qu’il fallait penser des fées et du diable, et qui ne s’en souciaient guère, il ressemblait assez à un homme campé au milieu d’un bois habité par des voleurs, mais qui parle