Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/158

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cheter le sel du fisc. De la terre et des branchages sont jetés sur les endroits où le sel attirerait les regards et tenterait la bonne volonté des passants. Cinquante soldats et vingt-cinq haiduques sont postés à intervalles, les armes chargées, pour faire reculer quiconque oserait s’avancer. Ils ont ordre de tirer si on ne tient pas compte de leurs menaces. Cependant, malgré ces précautions, le fisc peut avoir la certitude qu’on dérobe une grande quantité de sel. Il est bien difficile à des hommes qui ne craignent point le danger de ne pas prendre un peu de ce sel qui leur est si nécessaire, et qu’ils trouvent sous leurs pas, au risque d’entendre siffler une balle. Je doute d’ailleurs que les sentinelles fassent souvent usage de leurs armes. Les haiduques sont des montagnards du pays : ils s’empresseront de tourner le dos ou de contempler les nuages s’ils voient un de leurs voisins s’approcher d’un air suspect. Quant aux soldats polonais qui gardaient le sel et qui me répondirent par un regard d’intelligence lorsque je fredonnai l’air

La Pologne n’est pas encore perdue…,

ils paraissaient s’inquiéter médiocrement, malgré le zèle de l'officier allemand qui les commandait, que les Hongrois prissent ou non le sel de l’empereur d’Autriche.

Si on se rappelle avec quelle ingratitude le gouvernement autrichien a agi de tout temps envers les Hongrois,