Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/180

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certains qu’ils causent de leurs procès. S’ils n’en ont pas, ils se raconteront ceux de leurs voisins ou discuteront une question de droit. Le mot latin jus est admis dans la langue magyare, et figure dans le vocabulaire du paysan. Jusom, « mon droit» ; a’ jusomot fenntartom, « je soutiens mon droit » : voilà des expressions qui reviennent souvent dans sa bouche. Cependant, si « conquérant » que soit le Hongrois des steppes, il le cède évidemment au Sicule. Celui-ci semble né pour plaider. Outre qu’il a le sentiment du juste, comme tous les Orientaux, ce qui le porte à prendre souvent l’offensive, il excelle à discuter, il triomphe dans la réplique. Ce ne sont pas seulement ses affaires particulières qui l’occupent. Il connaît parfaitement ses droits, ses privilèges, et il vous en parle en homme entendu. Que l’empereur d’Autriche s’étonne de son impopularité, quand il n’est pas un Sicule qui ne sache, depuis son enfance, que la constitution est audacieusement violée !

Un jour que je visitais je ne sais quelle montagne du pays des Sicules, j’avais laissé nos chevaux dans la plaine sous la surveillance du guide. Au retour, nous le trouvâmes engagé dans une longue conversation avec un paysan des environs, lequel se donnait pour le garde champêtre du lieu. Le garde et le guide, étant de villages différents, ne se connaissaient pas ; ils pouvaient donc entamer une discussion. Et comme tous deux