Page:Auguste de Gérando - La Transylvanie et ses habitants, 1845, Tome II.djvu/186

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Ce qui caractérise encore les Sicules, c’est l’esprit de résistance, la ténacité. Ils sont avant tout les hommes du passé, auquel ils s’attachent avec résolution. Ils conservent fidèlement ce qui constituée la physionomie, l’originalité d’un peuple, lorsque tout s’efface autour d’eux. Aussi sont-ils aujourd’hui les seuls dépositaires des antiques traditions hongroises. En les écoutant parler, on croirait vivre au temps où régnaient à Bude les rois élus par la nation. S’ils semblent reculer ainsi vers des époques qui ne sont plus, en conservant le reflet du passé, c’est que leur fierté et leur patriotisme s’en accommodent ; et ils comptent encore par florins hongrois de cinquante kreutzers, comme au temps du glorieux roi Mathias. Ils ont beaucoup d’orgueil national : une femme sicule ne daignerait pas épouser un Valaque, un homme de la race vaincue.

Ce sentiment est si fort chez eux, qu'on ne les voit jamais parler une langue étrangère. Partout ailleurs, les Valaques se dispensent d’apprendre le hongrois : il font que les Magyars et les Saxons, pour s’entendre avec eux, connaissent l’idiome român. Parmi les Sicules, au contraire, les Româns perdent leur langue et leur nationalité. Lorsque, dans les comitats hongrois, un village est habité par des paysans magyars et valaques en nombre égal, au bout d’un certain espace de temps la population valaque absorbe la population hongroise, et la langue române domine. Ici, au contraire, l’élément