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LE PRINCE

monde ! Elle vous aime donc ? dit Léandre. Je puis m’en flatter, répliqua-t-il. Et dans quel lieu est-elle ? continua le prince. — Dans un château au bout de cette forêt, répondit l’amant. — Hé bien, attendez-moi, dit encore Léandre, je vous en donnerai de bonnes nouvelles avant qu’il soit peu. » En même temps il mit le petit chapeau rouge, et se souhaita dans le château. Il n’y était pas encore, qu’il entendit l’agréable bruit de la symphonie. En arrivant tout retentissait de violons et d’instrumens ; il entre dans un grand salon rempli des parens et des amis du vieillard et de la jeune demoiselle : rien n’était plus aimable qu’elle ; mais la pâleur de son teint, la mélancolie qui paraissait sur son visage, et les larmes qui lui couvraient les yeux de temps en temps en temps, marquaient assez sa peine.

Léandre était alors Lutin, il resta dans un coin pour connaitre une partie de ceux qui étaient présens. Il vit le père et la mère de cette jolie fille, qui la grondaient tout bas de la mauvaise mine qu’elle faisait ; ensuite ils retournèrent à leur place. Lutin se mit derrière la mère, et s’approchant de son oreille, il lui dit : « Puisque tu contrains ta fille de donner sa main à ce vieux magot, assure-toi qu’avant huit jours tu en seras punie par ta mort. » Cette femme effrayée d’entendre une voix et de n’apercevoir personne, et encore plus de la menace qui lui était faite, jeta un grand cri, et tomba de son haut. Son mari lui demanda ce qu’elle avait. Elle s’écria qu’elle était morte, si le mariage de sa fille