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GRACIEUSE

gageante dont lui parlait son jeune amant, ne put refuser d’entrer avec lui dans un petit traineau peint et doré, que deux cerfs tiraient d’une vitesse prodigieuse ; de sorte qu’en très-peu de temps il la conduisit en mille endroits de cette forêt qui lui semblèrent admirables. On voyait clair partout : il y avait des bergers et des bergères vêtus galamment, qui dansaient au son des flûtes et des musettes. Elle voyait en d’autres lieux, sur le bord des fontaines, des villagcois avec leurs maîtresses, qui mangeaient et qui chantaient gaîment. « Je croyais, leur dit-elle, cette forêt inhabitée ; mais tout m’y paraît peuplé et dans la joie. — Depuis que vous y êtes, ma princesse, répliqua Percinet, il n’y a plus dans cette sombre solitude que des plaisirs et d’agréables amusemens : les Amours vous accompagnent, les fleurs naissent sous vos pas. » Gracieuse n’osa répondre ; elle ne voulait point s’embarquer dans ces sortes de conversations, et elle pria le prince de la mener auprès de la reine sa mère.

Aussitôt il dit à ses cerfs d’aller au palais de féerie. Elle entendit en arrivant une musique admirable ; et la reine avec deux de ses filles, qui étaient toutes charmantes ; vinrent au-devant d’elle, l’embrassèrent, et la menèrent dans une grande salle dont les murs étaient de cris tal de roche : elle y remarqua avec beaucoup d’étonnement, que son histoire jusqu’à ce jour y était gravée, et même la promenade qu’elle venait de faire avec le prince dans le traîneau ; mais cela était d’un travail si fini, que les Phi-