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ET PERCINET.

pierreries de toutes les manières, des dentelles, des rubans, des gants et des bas de soie, tout cela d’un goût merveilleux ; rien n’y manquait. On lui mit une toilette d’or ciselé : elle n’avait jamais été si bien parée et n’avait jamais paru si belle. Percinet entra dans sa chambre, vêtu d’un drap d’or et vert (car le vert était sa couleur, parce que Gracieuse l’aimait). Tout ce qu’on nous vante de mieux fait et de plus aimable n’approchait pas de ce jeune prince. Gracieuse lui dit qu’elle n’avait pu dormir, que le souvenir de ses malheurs la tourmentait, et qu’elle ne pouvait s’empêcher d’en appréhender les suites. « Qu’est-ce qui peut vous alarmer madame ? lui dit-il ; vous êtes souveraine ici ; vous y êtes adorée ; voudriez-vous m’abandonner pour votre plus cruelle ennemie ? — Si j’étais la maîtresse de ma destinée, lui dit-elle, le parti que vous me proposez şerait celui que j’accepterais ; mais je suis comptable de mes actions au roi mon père ; il vaut mieux souffrir que manquer à mon devoir. » Percinet lui dit tout ce qu’il put au monde pour la persuader de l’épouser, elle n’y voulut pas consentir ; et ce fut presque malgré elle qu’il la retint huit jours, pendant lesquels il imagina mille nouveaux plaisirs pour la divertir.

Elle disait souvent au prince : « Je voudrais bien savoir ce qui s’est passé à la cour de Grognon et comment elle s’est expliquée de la pièce qu’elle m’a faite. » Percinet lui dit qu’il y enverrait son écuyer qui était homme d’esprit. Elle répliqua