Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/594

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elle le tint longtemps serré entre ses bras, lui mouillant le visage de larmes ; il semblait que sa douleur l’empêchait de parler. Le roi tout tremblant n’osait demander ce qui était arrivé, car il ne doutait pas que ce ne fût de fort grands malheurs. Enfin elle fit un effort pour lui raconter que sa femme était accouchée de trois chiens : aussitôt Feintise les présenta et l’amirale, se jetant aux pieds du roi, tout en pleurs, le supplia de ne point faire mourir la reine, et de se contenter de la renvoyer chez sa mère, qu’elle y était déjà résolue, et qu’elle recevrait ce traitement comme une grande grâce.

Le roi était si éperdu qu’il pouvait à peine respirer : il regardait les doguins et remarquait avec surprise cette étoile qu’ils avaient au milieu du front, et la couleur différente qui faisait le tour de leur cou. Il se laissa tomber sur un fauteuil, roulant dans son esprit mille pensées, et ne pouvant prendre une résolution fixe : mais la reine mère le pressa si fort, qu’il prononça l’exil de l’innocente reine. Aussitôt on la mit dans une litière avec ses trois chiens, et sans avoir aucun égard pour elle, on la conduisit chez sa mère, où elle arriva presque morte.

Les dieux avaient regardé d’un œil de pitié la barque où les trois princes étaient avec la princesse. La fée qui les protégeait fit tomber au lieu de pluie du lait dans leurs petites bouches : ils ne souffrirent point de cet orage épouvantable qui s’était élevé si promptement.