Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/603

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« J’ai tant de choses à vous dire, répliqua-t-elle, que voulant être en particulier, je suis venue vous chercher.

— Hélas ! ma sœur, dit-il en soupirant, que nie voulez-vous aujourd’hui ? Il me semble qu’il y a longtemps que vous ne me voulez plus rien. » Elle rougit, puis baissant les veux, elle demeura sur son cheval triste et rêveuse sans lui répondre. Enfin ses deux frères arrivèrent : elle se réveilla à leur vue comme d’un profond sommeil et sauta à terre marchant la première : ils la suivirent tous, et quand elle fut au milieu d’une pelouse ombragée d’arbres : « Mettons-nous ici, leur dit-elle, et apprenez ce que je viens d’entendre. »

Elle leur raconta exactement la conversation du corsaire avec sa femme, et comme quoi ils n’étaient point leurs enfants : il ne se peut rien ajouter à la surprise des trois princes : ils agitèrent entre eux ce qu’ils devaient faire. L’un voulait partir sans rien dire : l’autre voulait ne point partir du tout : et l’autre voulait partir et le dire. Le premier soutenait que c’était le moyen le plus sûr, parce que le gain qu’ils faisaient en les peignant les obligerait de les retenir : l’autre répondait qu’il aurait été bon de les quitter si l’on avait su un lieu fixe où aller et de quelle condition l’on était, mais que le titre d’errants par le monde n’était pas agréable : le dernier ajoutait qu’il y aurait de l’ingratitude de les abandonner sans leur agrément : qu’il y aurait de la stupidité de vouloir rester davantage au milieu d’une forêt où