Page:Austen - Emma.djvu/212

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aux courants d’air. Je ne voudrais pas vous indisposer contre lui, mais il n’est pas, je regrette de le dire, tout à fait ce qu’il devrait être.

Mme Weston fut désolée d’entendre ce réquisitoire ; elle prévoyait les conséquences qu’une pareille opinion pouvait avoir un jour ou l’autre et elle fit tout son possible pour effacer cette mauvaise impression. Toutes les portes furent fermées et on renonça au couloir. Il fallut revenir à la conception primitive ; Frank Churchill y mit tant de bonne volonté que l’espace jugé à peine suffisant pour cinq couples, un quart d’heure auparavant, lui paraissait maintenant pouvoir en contenir dix.

— Nous avons été trop généreux, dit-il dans nos appréciations des distances. Dix couples pourront parfaitement évoluer ici.

Emma hésita.

— Quel plaisir, dit-elle peut-il y avoir à danser sans l’espace nécessaire ?

— C’est juste, reprit-il gravement ; c’est un grand inconvénient.

Il n’en continua pas moins à prendre des mesures et, pour conclure, il ajouta :

— Somme toute, je crois qu’à la rigueur, on pourrait tenir dix couples.

— Non, non, répondit Emma, vous êtes tout à fait déraisonnable. Ce serait une cohue resserrée dans une petite pièce.

— Une cohue resserrée dans une petite pièce ! Mademoiselle Woodhouse, vous avez l’art de peindre un tableau en quelques mots. Néanmoins, au point où nous en sommes, je ne me sens pas le courage de renoncer à ce projet ; ce serait un désappointement pour mon père et je ne vois pas d’obstacle insurmontable.

Ils se séparèrent sans avoir rien décidé.

Dans l’après-midi du lendemain, Frank Churchill arriva à Hartfield avec un sourire de satisfaction