Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/168

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anticatholiques. Son Dictionnaire philosophique, un article surtout, l’article tyran, avait irrité contre lui le gouvernement. Ministres et sous-ministres ne lui pardonnaient pas d’avoir dit : « … qu’il valait mieux avoir affaire à une seule bête féroce qu’on pouvait éviter, qu’à une bande de petits tigres subalternes qu’on trouvait sans cesse entre ses jambes, » et voilà pourquoi, dans l’opinion de Diderot, ce dictionnaire avait été brûlé lors de l’affaire la Barre. Aussi le Philosophe craignait-il qu’en dépit de toutes ses protections, de ses talents, de ses ouvrages « ces gens-là ne jouassent quelque mauvais tour au Patriarche. » Celui-ci, non plus, n’était pas tranquille ; et pour adoucir ses ennemis, il avait cru devoir recourir à une cérémonie qui ne témoigne pas en faveur de l’énergie de son caractère[1]. On sait d’ailleurs que, par nature, il était moins enclin à faire tête à l’orage qu’à tenter de désarmer des ennemis trop puissants par de feintes concessions. À propos de la communion qu’il s’était fait administrer l’année précédente, ce qui avait plongé ses ennemis dans le plus grand étonnement, il écrivait de Ferney, en 1769, à son ami d’Argental : « À l’égard du déjeuner, je vous répète qu’il était indispensable. Vous ne savez pas avec quelle fureur la calomnie sacerdotale m’a attaqué. Il me fallait un bouclier pour repousser les traits mortels qu’on

  1. « Voltaire, dit Michelet (Louis XV et Louis XVI), eut une de ces peurs extrêmes, qui rendaient cet homme nerveux quelquefois ridicule. »