Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 3.pdf/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ceinte du parquet. Pendant ce temps, la foule toujours croissante, forçant successivement toutes les consignes, était arrivée, au milieu d’un désordre inexprimable, jusque dans la galerie vitrée qui sert de vestibule à la salle d’audience.

On se demandait comment pourraient entrer non seulement la cour et les jurés, mais le prévenu lui-même. M. de Béranger, pour lequel son assignation n’était pas un passeport suffisant, a été en effet arrêté pendant trois quarts d’heure de barrière en barrière, et il allait franchir la dernière limite, lorsqu’un gendarme lui disputa opiniâtrement le passage ; enfin, il a pris place au banc des avocats, entre Me Dupin aîné, son défenseur, et Me Coche, son avoué. La physionomie du prévenu est calme ; il s’entretient, en souriant, avec les personnes qui se trouvent auprès de lui.

Il était impossible de commencer l’audience avant que le corridor vitré et l’escalier qui y conduit fussent complètement évacués. Déjà quatre ou cinq personnes avaient été tirées de la foule, et étaient entrées en escaladant la fenêtre[1]. Les carreaux de vitres volaient en éclats. Faire rétrograder cette multitude était impossible, on a préféré lui ouvrir la porte intérieure. Alors deux cents personnes, brisant les vitres, déchirant leurs habits ou les salissant contre des murailles fraîchement blanchies, se sont portées les unes les autres au milieu de la salle qui semblait déjà trop pleine. Les bancs des accusés ont été envahis par un grand nombre d’avocats, et cette circonstance a nécessité la remise d’une affaire de vol qui devait précéder la cause politique. On

  1. De ce nombre étaient MM. Larrieux, président de la cour d’assises, et Cottu, conseiller.