Page:Büchner - La Mort de Danton, trad. Dietrich, 1889.djvu/311

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le bienvenu, quoique je ne vous connaisse pas ».

    Roche, pays montueux et très rude des Vosges, où les neiges ne fondent qu’en mai. Sans perdre un instant, il entreprit de porter la civilisation au milieu de cette contrée désolée, dont les quelques habitants vivaient à l’état presque sauvage. À l’aide de ses maigres ressources personnelles ou grâce aux faibles moyens que lui fournissaient des amis de son œuvre, il pratiqua des routes, construisit des ponts, fit cultiver les champs, forma des ouvriers en tout genre, établit une filature, une fabrique de rubans et de cordons, créa une caisse de crédit mutuel, une pharmacie, une bibliothèque, et s’attacha avant tout, il est à peine besoin de l’ajouter, à répandre l’instruction parmi ses paroissiens ; en un mot, il se dévoua, avec un zèle infatigable et qu’on ne peut assez admirer, au bien-être du pays, qui fut bientôt florissant et couvert d’une population laborieuse et éclairée. Le dévouement d’Oberlin n’avait d’égal que son désintéressement ; tandis qu’il faisait dans l’intérêt de ses administrés des sacrifices pécuniaires au-dessus de ses forces et compromettait ainsi l’avenir de ses sept enfants, il persistait à conserver pour demeure la misérable cabane humide, mal close et malsaine, où les intempéries faisaient rage, où les rats pullulaient, qu’on décorait du nom de presbytère, et ce n’est qu’au bout d’une vingtaine d’années qu’il finit par la quitter pour la cure neuve qu’avait fait construire à son intention le seigneur du pays, le baron de Dietrich. Partisan dès son jeune âge de la liberté et de l’égalité, le pasteur de Waldbach se déclara franchement pour la Révolution, et toute sa vie, sous l’Empire comme sous la Restauration, il garda ses sympathies à la République. Il encouragea au Ban de la Roche le départ des volontaires, et il eut son fils aîné tué dans leurs rangs, à la bataille de Bergzabern, en août 1793. Il croyait la liberté très compatible avec la religion, dont il était le défenseur convaincu, et, comme il le dit dans son journal intime, ne fut jamais un Pfaff (mot qui équivaut en français à ceux de frocard, calotin, etc.). Oberlin reçut la décoration de la Légion d’honneur en 1819. Il mourut le