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LES EXILÉS


Dioné


Abattu par la roche énorme que sans aide,
Seul, avait soulevée en ses mains Diomède,
Énée était tombé sous le char de l’ardent
Fils de Tydée, ainsi qu’un chêne, et cependant
Que sa mère Aphrodite, au vent échevelée,
L’emportait mourant loin de la noire mêlée,
Diomède, sachant qu’elle est faible, et non pas
Intrépide à guider les hommes sur ses pas
Vers le carnage, comme Ényo destructrice
Des citadelles, dont la mort suit le caprice,
Poursuivit Aphrodite en son hardi chemin ;
Et de sa lance aiguë il lui perça la main,
D’où le sang précieux jaillit fluide et rose,
Délicieux à voir comme une fleur éclose,
Riant comme la pourpre en son éclat vermeil,
Et tout éblouissant des perles du soleil.
Car, pareils dans leur gloire à la blancheur du cygne,
Les Dieux ne boivent pas le vin noir de la vigne.