Page:Barneville - Le Rythme dans la poésie française, 1898.djvu/52

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exemple, n’est pas composé des mêmes éléments que celui du fabuliste et n’en a pas la portée. Le vers de La Fontaine a sur les autres cette supériorité qu’il convient indistinctement à toutes sortes d’effets. Rappelez-vous la majesté des mètres pourtant si coupés du Paysan du Danube :

Romains, et vous, Sénat, assis pour m’écouter,
Je supplie avant tout les dieux de m’assister ;
Veuillent les Immortels, conducteurs de ma langue,
Que je ne dise rien qui doive être repris !
Sans leur aide il ne peut entrer dans les esprits
Que tout mal et toute injustice ;
Faute d’y recourir, on viole leurs lois.
Témoin nous que punit la romaine avarice :
Rome est par nos forfaits plus que par ses exploits
L’instrument de notre supplice.
Craignez, Romains, craignez que le ciel quelque jour
Ne transporte chez vous les pleurs et la misère,
Et, mettant en nos mains par un juste retour
Les armes dont se sert sa vengeance sévère,
Il ne vous fasse en sa colère
Nos esclaves à votre tour… etc. etc.