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APELLES. APELLICON. APICIUS.

dire à quel âge est morte ou mourra la personne peinte. Il faut supposer que le devin s’informait si cette personne vivait ou non.

APELLES, excellent acteur pour le tragique, sous Caligula, s’était mis en faveur par des voies très-infâmes ; mais, lorsque la fleur de sa jeunesse fut passée, il se fit comédien [a], et il se maintint de telle sorte dans les bonnes grâces de Caligula, que ce prince, qui le voulait avoir toujours avec lui en public même [b], le mit au nombre de ses conseillers [c]. Mais un jour qu’il lui demanda auprès de la statue de Jupiter, qui des deux te semble être le plus grand, Jupiter, ou moi ? il se mit si en colère de ce qu’Apelles ne répondait pas assez tôt, qu’il le fit fouetter cruellement. Il dit même, par forme de plaisanterie, qu’Apelles avait la voix agréable, même dans le ton plaintif (A). Quelques-uns assurent qu’il le fit mettre aux fers, et qu’il donna ordre que de temps en temps on le fit tourner sur une roue [d].

  1. Philo, Legat. ad Caïum, pag. 1021.
  2. Dio, lib. LXIX, pag. 643.
  3. Philo, Legat. ad Caïum, pag. 1021.
  4. Id. ibid.

(A) Caligula.… dit... qu’il avait la voix agréable, même dans le ton plaintif. ] Voici les paroles de Suétone sur ce sujet : Inter varios jocos cùm assistens simulacro Jovis Apellem tragœdum consuluisset, uter illi major videretur, cunctantem flagellis discidit, collaudans subindè vocem deprecantis, quasi eliam in gemitu prædulcem [1].

  1. Sueton, in Calig., cap. XXXIII.

APELLICON, qui acheta la Bibliothéque d’Aristote. Voyez les remarques de l’article Tyrannion.

APICIUS. Il y a eu à Rome trois Apicius renommés pour leur gourmandise. Le premier vivait avant le changement de la république, le second sous Auguste et sous Tibère, et le dernier sous Trajan. C’est du premier Apicius qu’Athénée veut parler, lorsqu’ayant dit, sur le témoignage de Posidonius, que l’on conservait à Rome la mémoire d’un certain Apicius, qui avait surpassé tous les hommes en gourmandise, il ajoute que c’était le même Apicius qui fut cause de l’exil de Rutilius [a]. On sait que Posidonius a fleuri du temps de Pompée, et que Rutilius fut exilé environ l’an de Rome 660. Le second ApicIus est le plus célèbre des trois. Athénée le place sous Tibère, et dit qu’il dépensa des sommes immenses pour son ventre, et qu’il y avait diverses sortes de gâteaux qui portaient son nom [b]. C’est de lui que Sénèque parle dans sa lettre XCV et dans le onzième chapitre du livre de Vitâ beatâ, et dans le Traité de Consolation qu’il écrivit à sa mère Helvia, sous l’empereur Claude. On trouve dans ce dernier ouvrage que cet Apicius avait vécu du temps de Sénèque, et qu’il avait tenu, pour ainsi dire, école de gueule et de gourmandise à Rome ; qu’il avait dépensé deux millions et demi à faire bonne chère ; que se voyant fort endetté, il avait enfin songé à examiner état de son bien ; et qu’ayant trouvé qu’il ne lui resterait que deux cent cinquante mille livres, il s’empoisonna,

  1. Athen., lib. IV, pag. 168.
  2. Idem., lib. I, pag. 7.