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APOLLONIUS.

matière, et cela fut cause qu’il ne s’aperçut point des fautes les plus visibles du manuscrit grec. Eos primus transtulit, c’est Vossius qui parle [1], Joan. Baptista Memmius ; sed infeliciter, eò quòd argumentum operis non intelligeret : undè non vidit sat manifestas græci codicis mendas, ac sæpè pueriliter alucinatur : sicut monitum Francisco Maurolyco præfatione in cosmographiam suam. Frédéric Commandin [2] en fit une nouvelle version beaucoup meilleure, qu’il fit imprimer à Boulogne, l’an 1566. Il y joignit la version du commentaire d’Eutocius, et plusieurs notes. Mais, parce qu’il se servit d’un manuscrit grec, qui était tout plein de fautes, il ne put pas faire sa version aussi bonne qu’il aurait voulu ; c’est pourquoi Marin Ghetaldus [3] se crut obligé de remonter jusqu’à la source du mal : il tâcha de corriger le manuscrit selon le sens de l’auteur, et de résoudre les problèmes ; et il crut avoir redonné la vie à cet ancien géomètre [4]. Voyez le livre qu’il intitula Apollonius redivivus, seu restituta Apollonii Pergæi inclinationum geometria, et son Supplementum Apollonii Galli, seu exsuscitata Apollonii Pergæi tactionum geometriæ pars reliqua, imprimés à Venise, l’an 1607, in-4o. Claude Richard, jésuite de la Franche-Comté, et professeur royal en mathématiques dans le collége impérial de son ordre à Madrid, expliqua dans ses leçons publiques, en 1642, les quatre premiers livres d’Apollonius, et en 1643, quatre autres livres dont il était l’auteur, où il suppléait l’autre partie de l’ouvrage de cet ancien géomètre [5]. Ce qu’il a fait sur les quatre premiers livres fut imprimé à Anvers l’an 1655, in-folio. Il avoue, qu’après avoir achevé ces deux ouvrages, il lut avec beaucoup de plaisir et d’admiration les Coniques de Claude Middorge [6], et la quadrature du cercle de Grégoire de Saint-Vincent, où il y a beaucoup de choses qui se rapportent aux livres d’Apollonius qui nous manquent. In quibus (de quadraturâ circuli duobus tomis) præter elementa conica peculiari ordine disposita, innumera prodit sicuti Middorgius, quæ spectant ad postremos quatuor Apollonii libros injuriâ temporum suppressos, in lucem revocandos [7]. Ferdinand Ier., grand-duc de Florence, prit à cœur de faire traduire plusieurs manuscrits arabes qui étaient dans sa bibliothéque. Jean-Baptiste Raimond, qui tenait le premier rang parmi ceux à qui ce prince donnait des pensions pour ce travail, avait promis de traduire Apollonius, que l’on avait en arabe dans cette bibliothéque : et il y a eu des auteurs qui ont publié que cette version était achevée [8] ; mais on n’en a rien trouvé parmi ses papiers [9]. Enfin le grand-duc Ferdinand II, et le prince Léopold de Médicis son frère, jetèrent les yeux sur Abraham Ecchellensis, professeur à Rome aux langues orientales, et le chargèrent de ce travail. Il traduisit en latin les Ve., VIe. et VIIe. livres d’Apollonius, avec le secours d’Alfonse Porelli, professeur en mathématiques dans l’académie de Pise. Cette traduction fut imprimée à Florence l’an 1661, in-folio, avec le commentaire du même Borelli, qui soutient dans sa préface que ces livres ne sont point supposés, mais qu’ils appartiennent véritablement à notre Apollonius. Il répond aux difficultés de Claude Middorge, qui s’imaginait que les trois livres que Golius avait apportés du Levant [10], étaient d’un Arabe qui s’était caché sous le nom illustre d’Apollonius. Le père Marsenne nous apprend cette opinion de Claude Middorge ; mais il ne l’approuve pas : il croit que le VIIIe. livre des Coniques d’Apollonius, et tous les autres ouvrages du même auteur, ceux même que Pappus n’a point cités, exis-

  1. Vossius, de Scient. Math., pag. 55.
  2. Et non pas Commandon, comme le nomme Moréri.
  3. C’était un patricien de Raguse.
  4. Ex Vossio, de Scient. Math., pag. 434.
  5. Claud. Richardus, præf., in Apollon., sect. XI.
  6. Tres Conicorum libros Claudii Middorgii... novâ methodo ex Apollonianis fontibus petitos et proprio ingenio appositè digestos. Claud. Richardi præf., in Apollon., sect. XI.
  7. Idem, ibid.
  8. Comme Jérôme Lunadorus, dans son livre de Romanâ Curiâ. Voyez Borelli dans sa préface.
  9. Abrah. Ecchellensis, in præf. versionis Apollonii.
  10. Le Ve., le VIe. et le VIIe. des Coniques d’Apollonius.