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ARÉTIN.

une lettre du dernier de mai 1535, à l’évêque de Faïence Ridolfo Pio, dit depuis le cardinal de Carpi, nonce alors en France. M. Ménage, qui a fait un chapitre exprès du Bernia dans la Ire. partie de son Anti-Baillet, n’a pas relevé cette faute. »

(M) Ses six volumes de lettres. ne valent pas grand’chose. ] Nous avons déjà vu sur ce sujet [1] le jugement d’un savant homme de Dijon ; il faut y joindre celui de M. Ménage. J’ai lu, dit-il [2], toutes les lettres de Pierre Arétin, sans y trouver rien que j’aye jamais pu faire entrer dans aucun de mes livres. Il n’y a que du style à prendre dans cette lecture. On ne saurait donner une idée plus expressive d’un ouvrage sec, et très-semblable à un logis démeublé, à une terre sablonneuse, en friche, à des landes ; car M. Ménage était un des hommes du monde qui savait le mieux profiter de ses lectures, et qui possédait le mieux l’art d’en varier les applications.

(N) Il mourut environ l’an 1556, à l’âge de soixante-cinq ans, plus ou moins [3]. ] « Ce qui fait conjecturer que l’Arétin est mort, ou sur la fin de 1555, ou dans l’année 1556, c’est que depuis le mois d’octobre 1555, date de l’épître dédicatoire du dernier volume de ses lettres, il ne se voit pas qu’il ait rien écrit ; et que le Ruscelli, qui écrivait son Rimario en 1557, y parle de l’Arétin comme d’un homme mort depuis peu : Onde il mio Aretino di buona memoria, dit-il au mot Rosta, dans le vocabulaire qui est à la fin du Rimario. Que ce soit en 1557 que ce Rimario ait été composé, cela paraît par le passage que j’en ai marqué ci-dessus [4] au sujet de Silvio Antoniano [5]. » Paul Freher s’abuse, en disant qu’Arétin mourut vers l’an 1566 [6].

(O) On conte qu’il se mit si fort à rire, entendant des discours sales, qu’il tomba... et en mourut sur l’heure. ] Voici les propres termes de l’auteur qui rapporte ce fait : Infandas obscœnitates de meretricibus, ut aïunt, sororibus suis, cùm audiret, ex risu sellum in quâ sedebat evertisse, occiputque vehementer graviterque ad terram afflixisse atque allisisse ut exemplò nequissimè interiret [7].

(P) Il se trouva mal d’avoir écrit contre Strozzi.… Je citerai mon auteur. ] C’est Rémi de Florence. Volse, dit-il [8], Pietro Aretino burlare e motteggiare il sig. Pietro Strozzi, quando egli diede Marano a Venetiani, e gli fece un sonetto, che cominciava :

Mentre il gran Strozzi Arma virumque cano, etc.


Ma il signor Pietro, come huomo valoroso, e che non voleva sue burle nè suoi motti, gli fece intendere, che attendesse ad altro, perche lo farebbe ammazzare insin nel letto. Onde il povero Aretino, che conosceva il signor Pietro huomo più da farlo che da dirlo, si mise tanto spavento, che serrato in casa, nè dando ingresso a persona alcuna, guardava pure se i pugnali piovevano, e menò giorno e notte una vila infelicissima, e per fin che lo Strozzi stette in paese de Veneziani non ardi mai uscir di casa. Je m’imagine que, quand il se vit hors de danger, il fit comme la truie lavée.

(Q) L’un de ses sujets d’importunité était la dot de sa chère fille Adria. ] Il l’aimait avec beaucoup de tendresse, et il s’était engagé à compter mille ducats à celui à qui il la promit en mariage. Ce futur n’était point un homme qu’on pût renvoyer au premier livre qu’on dédierait : une telle assignation, que certains auteurs ont employée auprès de leurs créanciers, n’était point capable de le contenter ; il stipula que mille ducats lui seraient comptés avant qu’il donnât l’anneau à sa future : Mille ducati è la promessa da me fatta allo sposo in con-

  1. Ci-dessus, immédiatement après la citation (43).
  2. Ménagiana, pag. 396 de la première édition de Hollande.
  3. Voyez ci-dessus la citation (*), entre la (34) et la (35).
  4. À la fin de la remarque (D) de l’article Antoniano.
  5. M. de la Monnoie, Remarques manuscrites.
  6. Paul. Freher., in Theatro Virorum illustrium, pag. 1461.
  7. Ant. Laurentinus Politianus, in Dialogo de Risu, pag. 87.
  8. Remigio Fiorentino, Considerat. civili sopra Guiccurdini, cap. VI, folio 8 verso. Voyez le Rime piacevoli, part. II, folio 12.