Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T02.djvu/394

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
384
ARMINIUS.

stallé en la place du professeur François Junius. Il avait exercé son ministère dans l’église d’Amsterdam pendant quinze années. Les disputes sur la grâce s’échauffèrent bientôt après dans l’académie, et il fallut que les états de la province ordonnassent des conférences entre lui et ses adversaires. Il fut mandé à la Haye diverses fois, et il y alla rendre compte de sa doctrine. Ce contraste, son assiduité au travail, et le chagrin de voir sa réputation flétrie par une infinité de médisances [a], affaiblirent de telle sorte sa santé, qu’il tomba dans une maladie dont il mourut le 19 d’octobre 1609 (D), avec de grands sentimens de piété et de patience [b]. Il eût été à souhaiter qu’il eût fait un meilleur usage de ses lumières (E), car encore qu’il soit vrai semblable que ses intentions étaient bonnes, on peut dire qu’il innova sans aucune nécessité, et dans des circonstances où l’innovation fut une source de désordres, qui aboutirent à un schisme. Il laissa sept fils et quelques filles, et un grand nombre de disciples qui continuèrent si ardemment la dispute, qu’il fallut avoir recours à l’autorité d’un synode national. Ils y furent condamnés, et ne se soumirent point, et ils formèrent une secte à part, qui subsiste encore, et qui s’est chargée peu à peu de plusieurs autres erreurs beaucoup plus considérables. Le Moréri d’Amsterdam indique quelques auteurs qui peuvent instruire de ce fameux démêlé. J’y ajoute les histoires de Triglandius et de Boxhornius, et un ouvrage assez nouveau d’un professeur de Tubinge [c]. Cette grande dispute fut très-féconde en écrits de part et d’autre. Un professeur en théologie à Cologne, déguisé sous un faux nom [d], en donna la liste, selon l’ordre des années, dans un ouvrage qu’il intitula Pacificatorium dissecti Belgii. Je doute que son catalogue soit bien complet. Il est difficile de n’oublier pas quelque chose dans une telle multitude de pièces. Quant aux écrits d’Arminius (F), voyez notre dernière remarque [* 1].

  1. * Gaspard Brandt a donné, depuis la mort de Bayle, un Historia vitæ J. Arminii, 1724, in-8o. (réimprimé en 1725, avec des notes et une préface de Mosheim), d’où est extrait ce qui compose l’article Arminius, dans le Dictionnaire de Chaufepié. Joly ignorait en 1748, que l’ouvrage de Brandt eût paru. Il n’en parle que comme d’un Ouvrage annoncé en 1716. Joly renvoie aussi au Sorberiana.

    conféra. Bertius, in Oratione funebri J. Arminii.

  1. Non pas à l’égard des mœurs, mais à l’égard des opinions.
  2. Tiré de son Oraison funèbre, prononcée par Pierre Bertius.
  3. Job. Wolfgangus Jager. Son ouvrage est intitulé Historia ecclesiastica Sæculi XVII. La Ire. Décade fut imprimée l’an 1692.
  4. Ægidius Afhackerius. Il prit le faux nom de Salomon Theodotus. Voyez Val. Andreæ bibliot. Belg., pag. 22.

(A) Il naquit... l’an 1560. ] Bertius s’amuse à donner à cette année natale d’Arminius deux caractères, sur lesquels il veut sans doute que l’on fasse des réflexions : il remarque, dis-je, que ce fut en cette année-là que Philippe Mélanchthon mourut, et que le colloque de Poissy fut tenu, où les députés des protestans plaidèrent la cause de deux mille cent quatre-vingt-dix églises qui demandaient humblement au roi la liberté de conscience [1]. Passons-lui ce calcul, qui n’est pas peut-être fort exact, mais disons-lui qu’il s’abuse quant à l’année : le col-

  1. Bertius, in Oratione funebri Jacobi Arminii.