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ARNAULD.

d’une sœur du chancelier de Silleri. De ce mariage sortirent cinq filles, toutes religieuses à Port-Royal (dont l’aînée, sœur Angélique de saint Jean, a passé pour un prodige d’esprit, de savoir, et de vertu), et trois fils. L’aîné est M. l’abbé Arnauld, abbé commandataire de Chomes. [a] qui, ayant porté les armes long-temps pour le service du roi, dans le régiment d’Isaac Arnauld son cousin, mestre-de-camp des carabins, se retira auprès de M. l’évêque d’Angers son oncle. Le second est Henri Arnauld, sieur de Luzancy, qui a passé sa vie dans la solitude. Le troisième est Simon Arnauld marquis de Pompone, ci-devant ministre et secrétaire d’état, et à présent encore ministre d’état, connu par ses ambassades de Hollande et de Suède [b]. M. Arnauld d’Andilli fut mis de bonne heure dans le grand monde. Il y a eu divers emplois qui l’attachaient à la cour, et à la suite du feu roi, et il ne se laissa point corrompre au mauvais air que l’on y respire (A). On peut voir dans le recueil de ses lettres le différent qu’il eut avec le président de Grammond, qui avait parlé de lui dans son histoire latine autrement qu’il ne devait. Ceux qui forgèrent le roman de l’assemblée de Bourg-Fontaine, désignèrent par les lettres A. A. l’un des prétendus complices du dessein que l’on suppose qui y fut pris d’introduire le déisme ; et quand ils virent que ces lettres ne pouvaient pas convenir à M. Arnauld le docteur, ils indiquèrent une autre personne, savoir Arnauld d’Andilli, comme on s’en est enfin expliqué fort nettement [c]. Mais l’auteur des factums des petits-neveux de Jansénius a fait voir par de solides raisons, que cette seconde application des deux A. A. était absurde (B). M. d’Andillli se retira au couvent de Port-Royal, en 1644 (C), et y a passé le reste de ses jours dans une application continuelle à des ouvrages de piété. Il y composa beaucoup de livres [d], que le public a reçus favorablement, et qui sont en telle quantité, qu’on en a imprimé huit volumes in-folio [e]. Il y mourut le 27 de septembre 1674, dans la quatre-vingt-sixième année de son âge [f].

Il avait perdu sa femme, l’an 1637, et il est bon de savoir la réflexion de Balzac sur cette perte (D).

  1. Il est mort au mois de février 1699.
  2. Tiré du Mémoire inséré dans le Mercure Galant, au mois de décembre 1693.
  3. Dans la Réponse du père Hazart, au factum des petits-neveux de Jansénius. Voyez leur IVe. factum, pag. 14.
  4. Voyez-en la liste à la fin de son Éloge, dans le Journal des Savans, du 9 de septembre 1675.
  5. Perrault, Hommes illustres, pag. 142, édition de Hollande.
  6. Moréri, pag. 346.

(A) Il eut divers emplois... à la cour,..... et il ne se laissa point corrompre au mauvais air que l’on y respire. ] C’était « l’un des hommes de France qui a eu pendant toute sa vie à la cour, à Paris, et dans les provinces, une réputation mieux établie [* 1], et plus généralement re-

  1. * Dans une lettre à Bernard, insérée d’abord dans les Nouvelles de la République des Lettres, avril 1704, et qui se retrouve, soit dans les éditions des Lettres de Bayle, soit dans les Œuvres diverses de Bayle, Des Maizeaux, sur le témoignage de Dubois d’Annemetz, page et favori du duc d’Orléans, peint Arnauld d’Andilli sous de bien vilaines couleurs. Le père Bougerel écrivit à ce sujet une lettre à des Maizeaux ; il y prend vigoureusement la défense d’Arnauld. Des Mai--