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ARNAULD.

connue de piété et de probité, n’y ayant personne qui n’ait souscrit de bon cœur à ce qu’a écrit de lui, il y a plus de cinquante ans, un auteur célèbre, qu’il ne rougissait point des vertus chrétiennes, et ne tirait point de vanité des morales ». Voilà ce qu’on trouve dans le IVe factum des petits-neveux de Jansénius [1]. On y trouve aussi [2], « qu’avant même qu’il eût quitté le monde, et lorsqu’il était à la cour, il a voulu que tout ce qu’il avait de génie pour les vers ne fût consacré qu’à la gloire de son Sauveur, et à faire goûter les vérités chrétiennes ; car il ne s’était point encore retiré, quand il a fait son poëme de la vie de Jésus-Christ [3], et ses stances sur les plus belles et les plus édifiantes vérités de notre religion. »

(B) On a fait voir …… que l’application qu’on lui faisait des deux A. A., pour le faire membre de l’assemblée de Bourg-Fontaine, était absurde. ] Je ne rapporterai pas toutes les raisons qu’on a alléguées pour le montrer, je dirai seulement qu’on a observé, entre autres choses, qu’il était de tous les voyages que le roi Louis XIII faisait toutes les années, avant et après le temps de l’assemblée chimérique de Bourg-Fontaine [4], pour dompter ceux de ses sujets que leur fausse religion avait engagés dans la révolte [5]. Ce lui était une occasion, ajoute-t-on [6], d’avoir plus de zèle pour la religion catholique, par l’aversion que ces sortes de guerres font avoir de l’hérésie ; mais ce n’était pas un moyen de devenir théologiens n’ayant jamais étudié en théologie, comme il aurait fallu être pour soutenir le personnage qu’on fait jouer à tous les auteurs de la fable de Bourg-Fontaine. Il savait de la religion ce qu’un homme de grand esprit en peut apprendre par le catéchisme, par les livres de piété, par la conversation avec des personnes fort saintes, en lisant la parole de Dieu et l’entendant prêcher ; mais moins il savait ce qu’on en enseigne dans l’école, plus il était incapable de former des doutes sur la vérité de nos mystères [7], parce qu’il s’était accoutumé de bonne heure à captiver son esprit sous l’autorité divine, qui nous est manifestée par l’Église, et que jamais personne n’a été plus éloigné de chicaner avec Dieu, et de vouloir comprendre par la raison faible et superbe ce que l’on se doit contenter de croire par une humble foi.

(C) Il se retira dans le couvent de Port-Royal. ] Continuons à citer le IVe. Factum. « Ce fut à Port-Royal des Champs qu’il se retira l’an 1644, où ses neveux, M. le Maître l’avocat, et un de ses frères, qui était d’épée, s’étaient retirés il y avait cinq ou six ans, lorsqu’il n’y avait point encore de religieuses. Car ce ne fut qu’en 1648, que la maison de Paris obtint de M. l’archevêque d’envoyer une partie des religieuses à leur maison des Champs. » C’est à mon lecteur à choisir entre l’auteur de ce factum et M. Richelet [8], qui ne donne pour lieu de retraite à M. Arnauld d’Andilli que sa maison de Pompone : je me contente de mettre de front ces deux diverses autorités [* 1], et je rapporte d’autant plus agréablement ce que l’on va lire, que l’on y trouve quelques-unes de ces choses particulières concernant la vie des grands

    zeaux, frappe des raisons du père Bougerel, envoya sa lettre aux rédacteurs d’un journal, et joignit un petit billet dans lequel il reconnaît avoir eu tort. Jordan, qui dans son Voyage littéraire, pag. 120, loue des Maizeaux de s’être retracté, et Joly qui copie Jordan en le citant, n’indiquent ni l’un ni l’autre où l’on peut trouver la lettre de Bougerel et le billet de des Maizeaux. La Bibliothéque historique de la France ne mentionne pas même ces deux pièces, qui sont imprimées dans la Bibliothéque raisonnée des Ouvrages des Savans, tom. V, pag. 356, et tome VI, pag. 71.

  1. * Leclerc dit qu’Arnauld, retiré en 1644 à Port-Royal des Champs, y resta jusqu’en 1664 ou environ. Il alla alors à sa terre de Pompone où Richelet le vit en 1667. Il se retira dans la suite à Port-Royal et y finit ses jours.
  1. À la page 12.
  2. Page 18,
  3. Voyez ci-dessous la remarque (C), citation (9).
  4. Ce temps est l’année 1621.
  5. IVe. Factum des petits-neveux de Jansénius, pag. 18.
  6. Là même.
  7. Ces paroles sont très-notables, et confirment ce que plusieurs soupçonnent, qu’il n’y a guère de gens moins persuadés que ceux qui emploient le plus de temps à disputer et à enseigner dans les écoles.
  8. Voyez le jugement qu’il fait de M. Arnauld d’Andilli à la tête du recueil des Lettres, qu’il a publié, pag. 10, édition d’Amsterdam en 1694.