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ASCLÉPIADE.

Il faut savoir que ce n’est pas Cicéron qui parle, mais l’orateur Crassus. C’est donc de Crassus, et non pas de Cicéron, qu’Asclépiade a été l’ami et le médecin. Prenez garde que Cicéron suppose que Crassus parlait ainsi l’an de Rome 662 [1] ; et n’oubliez pas qu’on parle là d’Asclépiade comme d’un homme qui ne vivait plus. Cela nous fournit une objection contre Pline, qui a dit qu’Asclépiade, ne gagnant guère à la profession de l’éloquence, se tourna du côté de la médecine au temps de Pompée [2]. Il est sûr qu’en 662 Pompée n’était encore qu’un jeune garçon. Voyez la remarque suivante, num. IV.

Jonsius suppose qu’il y a eu deux Asclépiades de Myrlea ; que le premier fut disciple d’Apollonius le grammairien, et auteur d’un livre intitulé Φιλοσόϕων βιϐλίων διορθωτικὰ, Philosophorum librorum emendationes [3], et que le second fit des livres touchant la grammaire et touchant les grammairiens [4]. Je ne vois pas sur quoi il se fonde pour admettre cette distinction. Sa meilleure preuve serait de dire, qu’Asclépiade de Myrlea réfutait dans sa grammaire un sentiment de Denys de Thrace. In isto opere Dionysii Thracis de partibus grammaticæ sententiam refellit, teste Sexto Empirico [5]. Ce Denys, selon Suidas, enseigna dans Rome au temps de Pompée, et avait été l’un des disciples d’Aristarque. Il faut donc, me dira-t-on, que l’Asclépiade qui l’a réfuté soit différent du disciple d’Apollonius. J’admets cette conséquence, mais je soupçonne qu’il y a un peu d’erreur dans Suidas. Il me semble qu’un disciple d’Aristarque [6] eût été trop vieux au temps de Pompée [7] pour enseigner : je dis donc que Denys de Thrace disciple d’Aristarque n’a pas vécu jusqu’au temps de Pompée. Il est donc possible qu’Asclépiade disciple d’Apollonius l’ait réfuté ; car cet Apollonius ayant été bibliothécaire d’Alexandrie après Ératosthène [8] qui mourut au commencement de l’olympiade 146 [9], a pu fort bien être contemporain d’Aristarque. Il a donc pu avoir des disciples contemporains de ceux d’Aristarque. Il n’est donc pas nécessaire qu’Asclépiade réfutateur de Denys de Thrace, soit plus jeune qu’un Asclépiade disciple d’Apollonius. Je ne sais pourquoi Vossius acquiesce si bonnement à la liaison qui a été faite par Suidas entre la qualité de disciple d’Aristarque, et celle de professeur à Rome au temps de Pompée [10]. On le critique avec raison sur ce qu’il a dit qu’Asclépiade d’Alexandrie fit un ouvrage touchant les peuples d’Attique, et il en donne pour témoin le scoliaste d’Aristophane. Æsclepiades Alexandrinus [* 1] τοὺς κατὰ δῆμον ἄρχοντας consignavit, ut autor est scholiastes Aristophanis in Nubes [11]. Jonsius lui montre que le scoliaste ne dit autre chose, sinon que cet Asclépiade nommait les demarques τοὺς κατὰ δῆμον ἄρχοντας [12].

(G) ..... Celles de M. Moréri ne sont pas considérables. ] 1°. Les anciens auteurs n’attribuent pas à Asclépiade de Myrlea, comme il l’assure, l’Histoire d’Alexandre-le-Grand citée par Arian. 2°. Dire que Strabon ajoute qu’Asclépiade de Myrlée avait enseigné la grammaire en Espagne, c’est prétendre qu’il avait dit les autres choses que Moréri avait déjà rapportées. Or cela est faux. 3°. C’est sans raison qu’il met en doute que la relation d’Espagne soit d’un autre Asclépiade, car Strabon la donne formellement à celui-là. 4°. Il ne fallait pas avancer si hardiment que Mithridate était en guerre avec les Romains, lorsqu’il tâcha de faire venir à sa cour le médecin Asclépiade ; car nous avons vu ci-dessus [13], que Cicéron parle de ce médecin comme d’un homme qui n’était plus en vie l’an 662 de Rome ; temps où

  1. (*) Populi Attici.
  1. Vide Fabricium, in Vitâ Ciceronis, ad ann. Urbis 662.
  2. Plin., lib. XXVI, cap. III.
  3. Jonsius, de Script. Hist. Philosoph., pag. 167.
  4. Idem, ibid., pag. 205.
  5. Idem, ibidem.
  6. Aristarque florissait en l’olympiade 156.
  7. Il mit fin à la guerre de Mithridate en l’olympiade 179.
  8. Jonsius, de Script. Hist. philosoph., pag. 149.
  9. Vossius, de Histor. Græcis, pag. 108.
  10. Idem, ibid., pag. 148.
  11. Vossius, de Histor. Græcis, pag. 507.
  12. Jonsius, de Script. Hist. Philosoph., pag. 207.
  13. Citations (25) et (26).