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ANCRE. ANDLO.

net, qu’il ne se sentît tousjours de la passion de celuy qui le fait, et qu’il en estoit comme des eaux, qui retiennent la qualité des veines de la terre ou des mines par lesquelles elles ont passé. Il avoit surtout une souveraine aversion pour ces sortes de gens, qui vont dans les maisons, pour sçavoir ce qui s’y passe, pour faire parler ceux qu’ils y trouvent, et pour rapporter ensuite ce qu’ils ont comme extorqué de leurs bouches par leur ruse et par leur artifice… [1]. Il disoit qu’il y avoit beaucoup de danger à croire légèrement ce qu’on disoit des gens. Il estoit sur ses gardes à cet égard [2]. » La maison d’un tel pasteur n’avait garde d’être le réduit des nouvellistes, c’eût été un grand désordre. J’ai parlé de cela ci-dessus, dans la remarque (H) de l’article d’(Henri) Alting ; et j’en parlerai encore dans la remarque (N) de l’article de (Janus) Gruterus.

(H) On jugera par l’écrit dont je parle ci-dessous, combien sa conversation était docte. ] Cet écrit est intitulé : Mélange critique de Littérature, recueilli des Conversations de feu M. Ancillon [3]. Il fut imprimé à Bâle, l’an 1698, en deux volumes in-12 [* 1], par les soins de M. Ancillon l’avocat, fils aîné du ministre, et qui s’était déjà fait connaître dans la république des lettres [4]. J’aurai souvent à parler de ce mélange ; et si quelquefois je ne tombe pas d’accord que tout y soit bien exact, ce sera sans avoir la ridicule prétention que cela puisse préjudicier, ni à celui qui a dit ces choses, ni à celui qui les a données au public. Il faut bien plus admirer que feu M. Ancillon, parlant sur-le-champ, ait eu tant d’exactitude en plusieurs endroits, que trouver étrange que sa mémoire n’ait pas été exacte partout : et, pour ce qui est de M. son fils, il a dû donner les choses telles qu’il les avait recueillies de la bouche de M. Ancillon. Voyez ce que je remarque touchant le Ménagiana [5] : le cas est pareil. On verra dans la préface de ce mélange pourquoi il n’a pas été intitulé Ancilloniana.

  1. * Chaufepié, d’après Nicéron, dit que le Mélange critique, 1698, a 3 vol., et que la réimpression de 1702, un vol. in-12, a été désavouée par Ancillon, parce qu’on y a fourré des choses qui font tort à la mémoire de son père et à lui-même. L’édition de 1698 n’a que deux volumes ; mais on y ajoute comme troisième volume le Discours sur la Vie d’Ancillon, qui est promis sur le titre des deux autres.
  1. Discours sur la Vie de M. Ancillon, pag. 229.
  2. Là même, pag. 230.
  3. Voyez le Journal de Leipsick, mois de juin 1698, pag. 287.
  4. On a divers ouvrages de sa façon, la plupart anonymes.
  5. Dans la remarque (A) de l’article Ménage.

ANCRE (Le Maréchal d’). Cherchez Concini.

ANDLO (Petrus ab), nom supposé, sous lequel un cartésien se cacha, pour écrire contre la dissertation de Abusu philosophiæ cartesianæ surrepente et vitando in rebus theologicis et fidei. M. Des Marets, professeur en théologie à Groningue, auteur de cette dissertation, l’avait publiée en 1670, pour représenter aux églises protestantes les grands maux qu’on avait à craindre, si l’on souffrait que les opinions de M. Descartes passassent des écoles de philosophie en celles de théologie. Quelques mois après, on vit paraître un écrit, intitulé Petri ab Andlo, Batavi, Specimen confutationis dissertationis de abusu philosophiæ cartesianæ, etc. Jamais réfutation ne fut écrite d’un style plus violent : M. Des Marets y fut traité de la plus désobligeante manière du monde. Il ne demeura pas en reste : son apologie parut bientôt, intitulée Vindiciæ dissertationis de abusu philosophiæ cartesianæ, où il n’y eut sorte d’injures qu’il ne déchargeât sur la tête de son ennemi. Il le traita de très-impudent socinien, de spinoziste, d’impie, de non-chrétien, d’a-