Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/25

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ces paroles, Vathek l’invita à dîner, & même à passer quelques jours dans son palais.

Le lendemain le Calife le fit appeller, & lui dit : relis-moi encore ce que tu m’as lu ; je ne saurois trop entendre ces paroles qui semblent me promettre le bien après lequel je soupire. Aussi-tôt le vieillard mit ses lunettes vertes. Mais elles lui tombèrent du nez, lorsqu’il apperçut que les caractères de la veille avoient fait place à d’autres. Qu’as-tu ? lui demanda le Calife ; que signifient ces marques d’étonnement ? Souverain du monde, les caractères de ces sabres ne sont plus les mêmes. Que me dis-tu ? reprit Vathek ; mais n’importe ; si tu peux, explique-m’en la signification. La voici, Seigneur, dit le vieillard : « Malheur au téméraire qui veut savoir ce qu’il devroit ignorer, & entreprendre ce qui surpasse son pouvoir ». Malheur à toi-même ! s’écria le Calife, tout hors de lui. Sors de ma présence ! On ne te brûlera que la moitié de la barbe, parce qu’hier tu devinas bien ; quant à mes présens, je ne reprends jamais ce que j’ai donné. Le vieillard, assez sage pour penser qu’il étoit quitte à bon marché de la sottise qu’il avoit faite en disant à son Maître une vérité désagréable, se retira aussi-tôt, & ne reparut plus.