Page:Bergson - L’Énergie spirituelle.djvu/58

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et la vie mentale, ah non ! nous l’arrêterons, et nous lui répondrons : vous pouvez sans doute, vous savant, soutenir cette thèse, comme le métaphysicien la soutient, mais ce n’est plus alors le savant en vous qui parle, c’est le métaphysicien. Vous nous rendez simplement ce que nous vous avons prêté. La doctrine que vous nous apportez, nous la connaissons : elle sort de nos ateliers ; c’est nous, philosophes, qui l’avons fabriquée ; et c’est de la vieille, très vieille marchandise. Elle n’en vaut pas moins, à coup sûr ; mais elle n’en est pas non plus meilleure. Donnez-la pour ce qu’elle est, et n’allez pas faire passer pour un résultat de la science, pour une théorie modelée sur les faits et capable de se remodeler sur eux, une doctrine qui a pu prendre, avant même l’éclosion de notre physiologie et de notre psychologie, la forme parfaite et définitive à laquelle se reconnaît une construction métaphysique.

Essaierons-nous alors de formuler la relation de l’activité mentale à l’activité cérébrale, telle qu’elle apparaîtrait si l’on écartait toute idée préconçue pour ne tenir compte que des faits connus ? Une formule de ce genre, nécessairement provisoire, ne pourra prétendre qu’à une plus ou moins haute probabilité. Du moins la probabilité sera-t-elle susceptible d’aller en croissant, et la formule de devenir de plus en plus précise à mesure que la connaissance des faits s’étendra.

Je vous dirai donc qu’un examen attentif de la vie de l’esprit et de son accompagnement physiologique m’amène à croire que le sens commun a raison, et qu’il y a infiniment plus, dans une conscience humaine, que dans