Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/304

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la caserne de Babylone. Il trouva le général Lafayette fort tranquille ; et lui ayant demandé ce qu’il fallait faire des deux cents volontaires qui attendaient sur la place de Grève, il reçut cette réponse : « Qu’ils retournent paisiblement chez eux ; ils doivent avoir besoin de repos. » M. Charras fit observer au général que beaucoup de ces braves gens ne trouveraient pas de pain chez eux en y rentrant. « Eh bien dit-il, qu’on leur donne cent sous par tête. » L’offre fut transmise aux ouvriers. Nous ne nous battons pas pour de l’argent, fut le cri qui s’échappa en même temps de toutes les bouches. Parmi ces hommes, le moins pauvre n’avait pas sur lui pour dix francs de linge et de vêtements.

Tandis que la fusillade s’éteignait dans Paris, et que devant le Louvre on creusait deux grandes fosses qui furent bénies par un prêtre et surmontées d’une croix avec ces mots : Aux Français morts pour la liberté, on s’occupait, à l’hôtel Laffitte, de fonder une dynastie nouvelle.

Ici commence une série d’intrigues, frivoles en apparence, mais qui sont caractéristiques et furent décisives.

Tous les financiers que le sentiment du danger avait appelés dans ces salons somptueux, étaient troublés et pensifs. Ils croyaient déjà voir leurs hôtels envahis, et, frappés de la force que le peuple venait de déployer, ils comptaient peu sur sa grandeur d’âme.

Le plan de M. Laffitte était arrêté. Il s’approche de M. Oudart : « Hier, je vous ai prié de vous rendre à Neuilly. À l’avertissement que je lui faisais