Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 1.djvu/490

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à propos, on avait obtenu sans peine du peuple qu’il se laissât disperser et désarmer. On afficha ensuite une proclamation qui commençait par ces mots : « Braves ouvriers, rentrez dans vos ateliers. » Les malheureux y rentrèrent, et n’y trouvèrent plus d’ouvrage.

Par une conséquence trop facile à prévoir, les capitaux se cachaient ; toutes les relations industrielles se trouvaient interrompues : chaque coup de fusil tiré pendant les trois jours avait préparé une faillite. La banque de France, quoique instituée pour parer aux grandes crises, mesurait ses escomptes sur ses craintes avec une prudence cruelle, et la sentinelle accoutumée veillait pour la protection de ces caves toutes remplies d’or, dans une ville toute remplie de pauvres.

Chaque jour ajoutait à la détresse du peuple, attestée par des faits innombrables. De toutes les imprimeries de la capitale, la plus considérable employait, quand, la révolution éclata, environ deux cents ouvriers, qui gagnaient régulièrement par jour de quatre à six francs. Après la révolution, les ateliers furent fermés pendant huit ou dix jours, au bout desquels on y rappela dix ou douze ouvriers et six mois après, on n’y en comptait encore que vingt-cinq ; et ils gagnaient, ceux-là, non plus quatre, cinq ou six francs, mais vingt-cinq ou trente sous par jour. L’imprimerie, pourtant, semblait devoir moins souffrir que les autres professions des résultats de la crise. Qu’on juge par là de l’immensité des désastres ! Dans le quartier des Gravilliers, une maison, située rue