Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/130

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l’annonçait à l’Europe en sauvant M. de Polignac et ses collègues. Proposer aux chambres l’abolition de la peine de mort, préparer de la sorte les esprits à l’indulgence, et confier le jugement aux pairs de France, amis pour la plupart des anciens ministres, tel fut le plan arrêté au château.

Depuis la révolution, le cours de la justice criminelle était en partie suspendu. Bien qu’il y eût dans les prisons des hommes condamnés au dernier supplice, le mouvement de la guillotine avait été arrêté sur toute la surface de la France. Le rigide Dupont (de l’Eure) s’affligeait de cette dérogation à la règle ; il ne comprenait pas que la loi pût rester en interdit. Mais toutes les fois qu’il était question de l’échafaud, le roi témoignait une sensibilité extrême. Les ministres ayant un jour décidé qu’un recours en grâce serait rejeté (il s’agissait d’un parricide), M. Laffitte entendit le fils de Philippe-Egalité s’écrier : « Mon père est mort sur l’échafaud. » Et en prononçant ces paroles, le roi avait le visage baigné de larmes.

Le système jugé le plus propre à sauver les anciens ministres n’ayant rencontré aucune opposition dans le conseil, le roi s’en réjouit comme d’une victoire due à son ascendant personnel, et il espéra tout de la condescendance de ses ministres.

L’abolition de la peine de mort avait été proposée dans la séance du 17 août, par M. Victor de Tracy. Dans la séance du 6 octobre, M. Bérenger avait lu sur cette proposition un rapport qui concluait à l’ajournement. Deux jours après, la discussion s’ouvrit. Après M. de Tracy, qui demandait que sa proposition fût acceptée, ou, du moins, examinée sans