Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/90

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rope. Mina ne pouvait suspecter la loyauté du maréchal Gérard : il promit, et partit pour Bayonne sans faire confidence à qui que ce fut de ses espérances et de ses projets. Arrivé à Bayonne, il tint parole. Mais son inaction, dans des circonstances où le succès dépendait tout entier de la promptitude et de l’audace, ne tarda pas à faire planer sur lui les plus cruels soupçons. Les réfugiés espagnols formaient alors deux camps : d’un côté, les partisans de la France ; de l’autre, ceux de l’Angleterre. Mina est accusé de trahison par quelques-uns de ses compatriotes : on le croit vendu aux Anglais. Enchaîné par sa parole, il ne peut ni agir ni se défendre. La défiance, si naturelle aux cœurs souffrants, se glisse parmi les réfugiés, les divise, pousse ceux-ci à une précipitation dangereuse, glace l’ardeur de ceux-là. Bientôt au malheur de ces divisions vient se joindre, pour les réfugiés, un malheur plus grand encore. Ferdinand VII, frappé d’épouvante, avait fait connaître les conditions de l’appui qu’il consentait à prêter à Louis-Philippe. C’est ce qu’attendait le cabinet du Palais-Royal. Il défendit tout-à-coup les départs, suspendit les secours, se mit en mesure de dissiper les rassemblements, imposa aux autorités l’obligation d’une surveillance active, et fit voler jusqu’à Bayonne, sur l’aile du télégraphe, des ordres inhospitaliers.

Ce fut alors que, cédant aux conseils de son désespoir, le colonel Valdès franchit la Bidassoa. Le 13 octobre, à la tête d’un petit nombre de braves, il touchait le sol sacré de son pays, aux cris mille fois répétés de vive la constitution, et sans autre garantie de succès que la justice de sa cause et son épée. La