Page:Boissière - Propos d’un intoxiqué, 1909.djvu/79

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que sur une tête ronde d’homme pratique, la tête d’un de ces gens qui ne connurent jamais un doute. Le doute, c’est la supériorité et le malheur des âmes analogues à l’âme de S. M. Dong-Khanh. Et pourtant, l’intelligence précise, l’activité, l’audace de ce lettré délicat étonnèrent nos fonctionnaires qui l’admiraient dans l’exercice de son métier de roi. Mais un monarque d’Annam reçoit toujours du ciel les dons intellectuels et moraux nécessaires au bonheur du peuple ; et chaque jour, sa tâche finie, pour si lourde qu’elle fût, celui-ci s’enfermait avec ses livres et la mémoire de ses prédécesseurs, ou s’échappait en gaîtés soudaines et inexpliquées. Durant ces derniers mois, toute une théorie de fantômes impériaux passait à son chevet pendant les longues heures de ses insomnies ; et il mourut de ces terrifiantes conversations avec des fantômes.

… Ces régions de la haute Rivière-Claire n’ont plus rien à envier à la vieille et frauduleuse Europe : on y falsifie l’opium ! souvent même, on remplace le pavot, dans la pâte mélasseuse qu’on vend aux nhàqués, par une composition extraite des feuilles d’un végétal désigné par les Amiamites sous la dénomination de phudzum. D’autres fois, le riz brûlé sert à colorer un produit infâme, à qui le thé vert donne quelque saveur. Soyons justes, cependant ! Ce n’est pas