Page:Bonnerot - Romain Rolland sa vie son oeuvre.djvu/69

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pauvreté. » Elle est le type de la jeune fille honnête, si souvent inconnue ou méconnue, dont la vie et l’amour aussi ne sont faits que de dévouement, d’abnégation et de sacrifice. Aussi Jules Bertaut, étudiant la Jeune fille dans la Littérature française (Louis Michaud, éd., 1911, pp. 265 à 280), n’a pas omis la pâle et charmante Antoinette, et lui donne pour compagne Henriette Sully, de Paul Bourget (La Terre promise), et Colette Baudoche, de Maurice Barrès.

Avec la Révolte commence une série de satires impitoyables, violentes, acérées. R. Rolland sait qu’il blessera ses lecteurs, mais il veut les blesser, et prend soin de les avertir en quelques mots (la Révolte, p. 15).

« Chacune de nos pensées n’est qu’un moment de notre vie. À quoi nous servirait de vivre, si ce n’était pour corriger nos erreurs, vaincre nos préjugés et élargir de jour en jour notre pensée et notre cœur ? Patience... chaque jour nous nous efforçons d’atteindre un peu plus de vérité... Comme dit un vieux proverbe, « la fin loue la vie et le soir le jour. »

Vérité ! C’est déjà l’appel qu’il jetait en 1900 dans son bel article sur le Poison idéaliste[1] ; c’est le cri de ralliement qu’il lancera toujours aux amis de Christophe hésitants ou égarés. Malgré les usages du monde, malgré le silence ou la critique, malgré l’homme, malgré la vie, R. Rolland ne veut que la vérité. Il ne mentira pas avec lui-même pour flatter celui-ci ou se ménager l’amitié de celui-là. Timide, il aura de l’audace ; généreux, il aura même de la brutalité pour dire à tous et contre tous ce que, sincèrement, il croit être vrai. Il s’est mis volontairement en dehors des coteries et des querelles ; il ignore

  1. Cf. des extraits de cet article page 42 de ce livre ; à rapprocher de certaines pages de Clérambault, citées plus loin.