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la terreur en macédoine

réclamèrent de Joannès et patiemment exécutèrent l’ordre. Les Turcs vinrent sur ces entrefaites et saccagèrent la malheureuse bourgade. Les anciens zaptiés se cachèrent pendant le massacre, le pillage et l’incendie, puis, les Turcs partis, s’installèrent sur les ruines, attendant toujours.

Que l’on juge de l’étonnement éprouvé par Joannès en les retrouvant accroupis devant un pan de mur noirci par l’incendie, et fumant d’innombrables cigarettes.

Ils le reconnaissent d’emblée, se lèvent, saluent militairement, s’inclinent avec respect devant Nikéa, et disent, avec leur gravité musulmane :

« Bonjour, capitaine !… bonjour, madame !… bonjour, camarades… c’est nous !…

— Bonjour, mes amis, répond Joannès en leur tendant la main ; alors, vous me nommez capitaine ?

— Le chef qui commande à Soliman et à Mourad doit être au moins capitaine, dit le plus âgé, un solide gaillard d’environ trente-cinq ans, barbu, moustachu, l’air résolu.

« Soliman, c’est moi !

— Et moi, je suis Mourad, ajoute le second, grand, sec, agile et paraissant une trentaine d’années.

— Je ne m’attendais pas à vous revoir et j’en suis heureux.

« Notre connaissance avait été un peu brusque…

— Tu pouvais nous tuer… tu nous as accordé la vie… nous nous sommes donnés à toi et nous te serons dévoués jusqu’à la mort…

« Et tes amis seront les nôtres ! »

En disant ces mots, ils serrent cordialement les mains de Michel et de Panitza, qui les contemplent