Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/101

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redoutable que l’Espagne, deviendroit aussi pernicieuse au commerce de Marseille, que les François en tems de guerre seroient incommodes aux Catalans, s’ils étoient les maîtres de l’isle de Majorque. Je te prie, mon cher Isaac, de jetter les yeux sur une carte géographique, & tu te convaincras toi-même de la vérité de mon sentiment.

La France ne seroit pas la seule puissance intéressée à ne point souffrir que les Espagnols eussent l’isle de Corse. Le roi de Sardaigne, sans doute, n’y consentiroit qu’avec peine. Nice, Ville-Franche, & les autres places maritimes qu’il a, ne sont déja que trop gênées & contraintes par la France. Je ne crois pas qu’il se souciât, d’avoir encore un voisin aussi incommode. Quelques politiques veulent qu’on consentît aisément que le roi de Sardaigne s’emparât de l’isle de Corse. Mais la France a la même raison de s’opposer aux Piémontois qu’aux Espagnols. Quoique les premiers soient beaucoup moins puissans, ils deviendroient très-incommodes à la France, dès qu’ils seroient unis avec d’autres alliés ligués contre elle. Que seroit-il arrivé à Toulon & à la Provence entière, si les Anglois & les Hollandois eussent été les maîtres de former des magasins, & d’avoir un