Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/102

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nombre de villes & des ports à quarante lieues de Provence, & de pouvoir y venir dans vingt-quatre heures mouiller avec une escadre, toutes & quantes fois ils auroient voulu ?

Si la France a presqu’autant d’intérêt que l’Espagne à voir le Port-Mahon hors des mains des Anglois, combien est-elle plus intéressée à ne point laisser établir une puissance redoutable dans des ports qui bloquent tous ceux qu’elle a dans la Méditerrannée ?

Quelques personnes croient qu’elle souffriroit sans peine que ces ports fussent au roi de Naples & de Sicile. Ce raisonnement est si foible qu’il se réfute soi-même. L’union des cours de Naples & de Madrid est si étroite, leurs intérêts sont si unis ensemble, que les mêmes raisons qui sont contre les Espagnols sont contre les Napolitains. D’ailleurs, tous les hommes sont mortels : la Divinité n’a pas exempté les souverains des loix du trépas. Si, par malheur, le prince des Asturies, qui n’a point d’enfans, venoit à mourir, ne voilà-t-il pas ces ports entre les mains de l’Espagne, &, par conséquent, d’une puissance dont les forces sont à craindre ? Mais, dira-t-on, qui sçait si par des articles secrets des mêmes traités qui rendroient les Napolitains maîtres de ce pays, ils ne seroient pas obligés