Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/111

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négociation, aucun accommodement, aucun bail, aucun contrat, qui ne se fasse le verre à la main ; & qui ne soit arrosé de la liqueur enchanteresse. Elle ne met point leur politique en défaut : & après avoir bû toute la journée, un Suisse connoît parfaitement ce qui convient à l’utilité de sa patrie. C’est-là une espèce de miracle, mais l’on ne peut douter de sa réalité qui paroît manifestement : les cantons ayant maintenu pendant tant de siécles leur liberté contre plusieurs princes qui ont voulu les mettre sous le joug. C’est à leur union qu’ils doivent leur conservation & l’estime qu’ils se sont attirée par toute l’Europe, où il n’est point de princes qui ne soient bien aises d’être leurs alliés.

Les Suisses ont trouvé le moyen d’avoir un grand nombre de soldats disciplinés & aguerris qui ne leur coûtent rien. Ils envoyent leur jeunesse servir dans les pays étrangers. Beaucoup de souverains ont des régimens Suisses à leur solde, qui sont entretenus par des recrues que les cantons permettent de faire chez eux. Mais à mesure que les jeunes gens s’engagent & sortent de la patrie pour un certain tems, ceux qui les avoient précédés