Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/131

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incommoder les habitans. Juge par-là de la prodigieuse grandeur de l’ancienne Alexandrie.

Quelques ignorans ont prétendu que les murs dont je te parle étoient ceux qui subsistoient du tems des Romains. Mais il faut n’avoir aucune connoissance de l’histoire, pour oser soutenir une pareille chose. Cette ville n’auroit pas eu la quinziéme partie de l’étendue que nous sçavons qu’elle devoit avoir. Et dès qu’on n’est point aveuglé, il est aisé de se convaincre soi-même que ces murs n’ont pû être bâtis, ni par les Grecs, ni par les Romains ; ils sont construits d’une infinité de marbres & de colonnes brisées, entrelacées avec des pierres : & les murailles de la nouvelle Alexandrie montrent les restes & les débris de l’ancienne. Au reste, mon cher Monceca, cette moderne Alexandrie, dont je te parle, n’est point la véritable ville d’Alexandrie, telle qu’elle subsiste aujourd’hui. A peine trouve-t-on deux cent personnes qui habitent les ruines qu’elle renferme. Elle est si déserte, que pendant la nuit, & lorsqu’il est encore grand matin, on n’y sçauroit aller sans courir beaucoup de risque d’être volé.