Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/156

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confirmer les contes que l’on faisoit des charmes des anciennes magiciennes. Horace parle d’une certaine Canidie, qui se servoit, pour composer ses philtres, des ossemens qu’elle alloit déterrer dans les cimetières. Les nazaréens sont persuadés qu’il y a dans certains os une très-grande vertu. Les Mahométans, sur-tout les Persans, ont les mêmes idées. Mais je pense qu’il faut aimer à donner un air de mystère & de religion aux choses les plus communes, pour sanctifier un morceau de terre, & le regarder, pour ainsi dire, comme une portion de la Divinité.

Ce que les nazaréens appellent reliques, n’est qu’une simple portion de matière égale à toutes les autres, & qui n’a pas plus de vertu que la plus petite & la plus méprisable. Car si la matière qui forme un os avoit des qualités qui fussent au-dessus des forces de la matière ordinaire, & qu’elle participât au pouvoir divin, elle ne sçauroit & ne pourroit jamais perdre ses avantages. Or, il n’est rien de si aisé que de réduire la tête d’un saint à former, par la suite du tems, une partie du corps d’un voleur de grand chemin. Alors la matière qui composoit la tête du saint, aura, à coup sur, perdu sa vertu divine. Et il est ridicule de soutenir qu’une chose puisse