Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 3.djvu/165

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Il y a autour du Caire plusieurs tombeaux de docteurs ou santons mahométans, qui sont très-fréquentés par un grand nombre de personnes qui y ont une dévotion extraordinaire. Un de ces principaux tombeaux est celui du fameux docteur Chafaï. Il vaut presqu’autant de revenu à certains santons & dervis qui ont soin de l’entretenir, que l’échine ou le croupion de S. François aux Franciscains ses disciples. Les moines Turcs sont aussi zélés pour leurs saints, que les moines nazaréens le sont pour les leurs. Ils ont employé, pour se conserver Chafaï, un moyen digne de la fourbe du plus hardi janséniste convulsionnaire.

Un souverain d’Egypte, calife de Babylone, & qui y tenoit sa cour, voulut faire transporter le corps de ce fameux Chafaï dans les lieux qu’il habitoit. Il écrivit au gouverneur d’Egypte de le faire exhumer, de le mettre dans un cercueil magnifique & de le lui envoyer. Le gouverneur fut très-fâché de l’ordre qu’il avoit reçu, n’ignorant pas la profonde vénération que tout le peuple avoit pour ce prétendu saint, il craignoit une émeute ; &