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LETTRE LXXX.

Aaron Monceca, à Jacob Brito.

C’est ici le centre du ridicule, comme ce l’est aussi du bon goût & de la politesse. On peut dire, mon cher Brito, que cette ville renferme les deux extrémités opposées. Elles y ont toutes les deux un grand nombre de partisans. Si les sciences sont cultivées, chéries & aimées par beaucoup d’honnêtes-gens, la folie y est portée au suprême dégré par les plus grands impertinens de toute l’Europe. Comme ils sont en grand nombre ; ils balancent souvent l’autorité & les décisions des personnes sensées, ils entraînent après eux l’imbécille public, toujours la dupe de quiconque veut le tromper.

Ce sont les suites du pouvoir qu’ont ces fanatiques imbécilles & prévenus, qui font gémir le bon sens opprimé, & résolvent les plus habiles gens à laisser un libre cours à l’erreur. Je comprends en effet, qu’il est très-ennuyeux pour les véritables sçavans d’être sans cesse obligés de régenter une foule d’ignorans entêtés, qui poussent souvent l’impertinence jusqu’à mépriser