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LE SECRET
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ferai-je si je le trouve malade, très-malade, mourant sur son sein à elle ? Que ferai-je ? »

Une voie se présentait nettement devant lui, et le premier pas dans cette voie était un voyage rapide à Audley. Il fit son porte-manteau, grimpa dans un cab, et atteignit la station du chemin de fer avant la fin de l’heure qui suivit la réception de la lettre d’Alicia, arrivée par la poste de l’après-midi.

Le village obscur laissait vaciller faiblement ses lumières à travers l’obscurité grandissante, quand Robert Audley arriva à Audley. Il laissa son porte-manteau au chef de la station, et traversa sans se hâter le sentier qui conduit à la retraite calme du château. Les arbres formant la voûte déployaient leurs branches sans feuilles au-dessus de sa tête, nues et fantastiques dans la demi-obscurité. Un vent mugissant tristement balayait les prairies basses et secouait en tous sens les branches de ces arbres sévères sur le fond sombre et gris du ciel. On eût dit d’affreux bras de géants courbés et vieillis, indiquant à Robert la maison de son oncle. On eût dit des fantômes menaçants dans le glacial crépuscule d’hiver, gesticulant vers lui pour lui faire hâter son voyage. La longue avenue, si brillante et si délicieuse lorsque les tilleuls parfumés éparpillaient leurs fleurs légères sur le sol, et que les feuilles des églantiers flottaient dans l’atmosphère d’été, était terriblement sinistre et désolée dans le morne intervalle qui sépare les simples réjouissances de Noël de la pâle aurore du printemps qui approche, — un temps d’arrêt mortel dans l’année, pendant lequel la nature semble engourdie dans un sommeil léthargique, attendant le merveilleux signal pour parer les arbres et pour faire éclater les fleurs.

Un pressentiment plein de tristesse se glissa dans le cœur de Robert Audley comme il se rapprochait de la maison de son oncle. Chaque contour changeant dans