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DE LADY AUDLEY

— Parce que rien de tout ce qu’elle a fait ne prouve la folie. Elle a fui de chez elle parce qu’elle n’y était pas bien, et qu’elle voulait trouver mieux. Il n’y a pas de folie là dedans. Elle a commis le crime de bigamie pour obtenir une position et une fortune ; ce n’est pas de la folie ; et quand elle s’est trouvée dans une situation désespérée, au lieu de recourir à des moyens extrêmes, elle a tramé un complot qui demandait du calme et de la réflexion. Tout cela n’est pas de la folie.

— Mais la tache de la folie héréditaire…

— Elle peut se transmettre jusqu’à la troisième génération, et reparaître chez les enfants de cette dame, si elle en a. La folie n’est pas forcément léguée par la mère à la fille. Je voudrais vous venir en aide si je le pouvais, monsieur Audley, mais il n’y a pas de preuves de folie dans l’histoire que vous m’avez racontée. Aucun jury anglais n’accepterait en pareil cas l’excuse de la folie. Ce que vous avez de mieux à faire, c’est de renvoyer cette dame à son premier mari, s’il veut la reprendre. »

Robert tressaillit à ces mots.

« Son premier mari est mort… du moins il a disparu… et j’ai mes raisons pour le croire mort. »

Le docteur Mosgrave vit le mouvement de Robert, et remarqua que sa voix était embarrassée en parlant de George Talboys.

« Le premier mari de la dame a disparu, dit-il en appuyant sur les mots, et vous le croyez mort. »

Il s’arrêta un instant et contempla le feu, ainsi que l’avait contemplé Robert quelques moments auparavant.

« Monsieur Audley, reprit-il tout à coup, il ne doit pas y avoir de demi-confidence entre nous. Vous ne m’avez pas tout dit. »

La figure de Robert exprima toute la surprise qu’il éprouvait à ces paroles.